Professeur Idan Segev
ELSC de l’U.H.J
On est au milieu d’une période de « big science »: de nombreux scientifiques vont collaborer à la recherche sur le cerveau, ce n’est pas l’effort d’une personne. C’est un système physique qu’il faut comprendre. Mais que signifie « comprendre le cerveau »?
Il y a d’autres exemples de « big science »: Janelia Farm, les conférences TED et l’intervention de Sebastian Seung (connectome project), le projet européen HBSP (Human Brain project), et l’ELSC. Ce sont des approches mégalomaniaques, qui impliquent des dizaines de chercheurs et de disciplines.
Edmond et Lily Safra ont poussé le modèle du nouveau centre, l’ELSC. Le défi fondamental, c’est comment représenter le monde avec des impulsions électriques? Car le cerveau ne voit pas d’image, n’entend pas de son, il ne fait que traiter des milliards de pics. Cette transformation est fondamentale, et c’est le challenge sous-entendu apr la phrase: comprendre le cerveau. Il faut alors connecter les différents niveaux: CNS (1m) > Systèmes (10cm) > Maps (1cm) > Networks (1mm) > Neurons (100 microns) > Synapses (1 micron) > Molécules (1 Angstrom).
Idan Segev reprend son exemple de Brancusi, l’essence d’un modélisateur, capable de réduire un baiser à son expression la plus simple. De la même manière, Einstein était un génie de la modélisation, une description mathématique d’un phénomène. Quelle pourrait être la modélisation du cerveau? L’une des approches, c’est de penser « impulsion électrique », pics. Quelle que soit l’espèce considérée, le langage du cerveau, c’est le « pic de stimulation électrique » (spikes). C’est le langage universel du cerveau. Selon le rythme de diffusion des pics, on exprime tel ou tel message, on souffre de telle ou telle pathologie.
Le premier modèle mathématique provient d’Hodgkin et Huxley, en 1952 (prix Nobel). Ils ont fourni l’explication physiologique des pics. Pour le cerveau, on n’en est pas encore là. Etre capable de conduire, répliquer, modifier un cerveau, à partir d’une série de règles et d’un modèle suffisamment acceptable.
Une deuxième grande avancée: comprendre la dynamique des réseaux.
La modélisation du système sanguin à l’intérieur du cerveau est également importante, de manière à ne pas provoquer d’hémorragie lors d’opérations ou d’insertion d’électrodes, par exemple. Cela permet de déterminer le meilleur trajet lors d’une opération, pour retirer une tumeur.
Il y a aussi le projet « blue brain« : il s’agit de simuler une partie du cerveau. Répliquer l’activité de milliers de cellules (10 000 cellules, des milliards de synapses) dans un ordinateur. L’ordinateur n’est pas à Jérusalem (il coûte 20 millions de dollars) mais l’équipe de Jérusalem y a accès. Le projet a pour but, pour l’instant, de modéliser le cerveau d’une personne autiste.
Y a-t-il un modèle mathématique de l’amour, de la souffrance, etc.? La réponse est non. On ne pourra comprendre que les principes au niveau du réseau, mais rien de plus précis.
Enfin, voici le vaisseau amiral européen (EU flagship): HBP (Human Brain Project). Les américains ont réussi deux grands projets pour l’humanité: aller sur la Lune, décoder le génpme. Si l’Europe veut aller loin, il faut joindre les efforts, entre pays, entre disciplines? Il faudra des super-ordinateurs. Il faudra des écrans spécialisés pour visualiser les données, les questionner, de plusieurs places simultanément: déplacer des synapses, verser de la dopamine, tout cela sur un modèle au travers de cockpits de visualisation. Il daudra des salles de conférence (visioconférence, un projet pour Orange Business Services?).
Bref, le grand drame du 21e siècle est en train d’être écrit: le grand livre du cerveau!